Après Lassonde, Labatt Bleue: prière d’initier les avocats aux communications 101 (et 2.0)

C’est la deuxième fois qu’une chose semblable se produit ici : en voulant protéger l’image d’une entreprise, on crée une crise qui l’endommage encore plus. Au début avril, c’était Lassonde, dont les actions devant les tribunaux à l’endroit d’une autre entreprise, afin de protéger sa marque Oasis, ont soulevé une mini-tempête sur les médias sociaux, après avoir été révélées dans les médias.

Labatt a, sans le vouloir, déclenché une surenchère de commentaires sur Twitter.

Et plus tôt cette semaine, c’est Labatt qui, après avoir constaté que le quotidien The Gazette avait publié en ligne un photo du meurtrier Luka Rocco Magnota posant avec une bouteille de Labatt Bleue, avait envoyé une mise en demeure sommant le quotidien de retirer cette photo. The Gazette a refusé. Et l’histoire a, encore une fois, provoqué une vague de commentaires sur les médias sociaux, surtout sur Twitter.

Le meilleur tour d’horizon de l’histoire que j’aie vu est cet article du Globe and Mail. On y souligne  évidemment que Labatt n’a fait qu’exacerber le problème avec son action, et aussi que les entreprises sont désormais constamment sujettes à des situations où le contrôle de leur image leur échappe. Et sur Infopresse, des spécialistes ont décortiqué ce que pourrait être l’impact potentiel d’une telle photo sur la marque.

Mais un autre aspect que je trouve frappant, c’est cette sorte de mur de Berlin qui semble subsister, dans bien des entreprises, entre les gens qui s’occupent des communications, et ceux responsables des enjeux légaux, même si tout ce beau monde se penche au départ sur des questions d’image. Ceux qui prennent la décision d’envoyer des mises en demeure (ou, dans le cas de Lassonde, d’intenter des poursuites), le font en ayant en tête l’aspect légal. Et jusqu’à maintenant, les répercussions hors de leur carré de sable restaient négligeables. Plus maintenant : impossible, désormais, de divorcer les actions de l’écho qu’elles auront dans le public, via les médias et les médias sociaux. Et, si le but premier de tout le monde est véritablement de préserver au mieux l’image de l’entreprise, ce genre d’impact devra désormais être pris en compte, par ceux qui émettront des avis légaux. Les bureaux d’avocats et les services de contentieux sont-ils équipés en conséquence ?

  1. Bonjour Marie-Claude,

    Analyse que je partage entièrement, notamment sur la question du cloisonnement des services. J’avais soulevé ce point dans mon propre papier (http://comfluences.net/labatt-magnotta-et-gestion-de-crise-le-danger). Il semblerait que certaines compagnies soient appelées à découvrir « l’effet Streisand » à leurs dépends.

    Quand à savoir si les cabinets d’avocats sont équipés de réel savoir faire PR, c’est une bonne question (quelqu’un aurait-il des éléments de réponse ?).

    Pour info, l’Ottawa Citizen livrait également une intéressante analyse hier : http://www.ottawacitizen.com/opinion/columnists/Column/6741001/story.html

    Comme disait l’un de mes followers hier : « Quand les avocats jouent à #Mirador… »

  2. Certes, vous soulevez là une situation intéressante. Les avocats ont le droit de poursuivre, mais, est-ce juste pour autant…?

  3. Sebastien Fassier

    C’est une histoire très similaire à celle, il y a quelques semaines, des bannières Heineken affichées lors de combat de chiens en Asie :
    http://now.msn.com/money/0417-heineken-dog-fight.aspx

    Sauf que Heinekein avait réagit par la voix de la conversation (directement avec les journalistes et via les médias sociaux) et non au moyen d’une demande d’injonction ou autres.

    Conclusion : L’arsenal juridique n’est pas inutile dans la protection du droit à l’image pour une entreprise, mais ne doit en aucun cas être la première ou la seule solution envisagée.

  4. Marie-Claude,

    Vous avez tellement raison de soulever ce point! Comme on dit, à chacun sa spécialité… et visiblement, les communications ne sont pas la tasse de thé des avocats!

    J’abonde dans le sens des propos de David Millian. Le travail en silo, ou le cloisonnement des services, est très répandu dans les organisation, privées ou publiques. À l’ère du 2.0 et des communications bidirectionnelles symétriques, l’heure est à la discussion, au partage d’information, à la collaboration.

    Fort heureusement, de plus en plus d’organisations modifient leur modèle d’affaires afin de donner plus de place à la collaboration et aux communications. Puis, pour faire face aux enjeux, les entreprises les plus performantes font davantage confiance à leur service de communications et de relations publiques.

    Enfin, j’oserais même faire un parallèle avec le monde politique. À voir le conflit qui perdure et la piètre performance des communications gouvernementales (propagande par la désinformation et en associant le mouvement étudiant à des extrémistes dangereux, les comparant presque à des terroristes!), je me demande bien qui se cache derrière les politiciens? Qui sont ces stratèges? Il y a fort à parier que ce ne sont pas des professionnels des communications. Parce qu’en fait de gestion de crise, on a déjà vu mieux!

    Patrick Préville
    Indice RP

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