Rahaf, Obama, le 2.0 rassembleur… et quelle différence d’un président à l’autre !

Rahaf Harfoush : en coulisses de la stratégie 2.0 d'Obama

Rahaf Harfoush : en coulisses de la stratégie 2.0 d'Obama

J’ai déjà  souligné, comme plusieurs autres, comment la baisse de certains médias traditionnels et la montée des réseaux sociaux, entraînent la perte de quelque chose d’important: une sorte d’espace public et commun, un consensus social sur ce qui, représente l’information importante pour une communauté. J’en avais notamment parlé dans un précédent billet intitulé Questions d’une dinosaure (qui s’assume).  

Je conserve, du moins en ce qui concerne ce sujet, mon côté dinosaure (et je l’assume toujours). Mais je m’en voudrais de ne pas partager une ou deux réflexions qui montrent un peu l’envers de la médaille, et qui m’ont été inspirées par la conférence, au dernier RDV Média, de Rahaf Harfoush, dont on peut voir l’entrevue vidéo  sur le site d’Infopresse aujourd’hui.

Ceux qui veulent en savoir plus sur elle peuvent aller lire quelques détails sur sa carrière, et l’entrevue préliminaire qu’elle avait accordée, sur le blogue RDV Média. Elle a participé, au sein de l’équipe d’Obama, à la mise en place et au fonctionnement de la stratégie des nouveaux médias. Elle relate son expérience, et les enseignements qu’elle en a tiré, dans son livre Yes We Did, et avait donné un aperçu des aspects les plus frappants lors de sa conférence, le 16 septembre dernier. D’ailleurs, ajoutons que cette canadienne d’à peine 25 ans (elle a fait ses premières armes en travaillant avec Don Tapscott sur son best-seller Grown up Digital), parle un français fort honorable, teinté d’un accent québécois dont elle s’ennorgueillit… même s’il mystifie quelque peu, en Suisse, ses collègues du Forum économique mondial, où elle occupe un poste présentement.

Et voici donc, en vrac, quelques éléments qui m’ont particulièrement frappée dans sa conférence.

Il y a d’abord le « essai et erreur », combiné à un grand professionalisme. « Nous avons commencé doucement, avec une page MySpace et un groupe Facebook, et appris en  faisant tout au fur et à mesure, racontait Rahaf Harfoush. Nous avons pris le temps de voir ce qui marchait, et ne marchait pas… » En même temps, l’équipe d’Obama a mis au point, en cours de route, un branding et un design forts et constants. Cela a a donné toute la puissance au message de Obama, tout en permettant d’appliquer avec succès cette autre règle fondamentale de l’univers du 2.0: laissez aller votre message. Ainsi, à l’approche de l’Halloween, des citoyens ont créé un mouvement baptisé Yes We Carve , et dédié à la conception de « Barack O’Lanterns ».  Tout cela, comme d’ailleurs le fameux vidéo initié par Will.i.am, le rappeur des Black Eyed Peas, échappait complètement au contrôle des communicateurs et des organisateurs.  » Tout cela n’était absolument pas autorisé, a raconté Rahaf Harfoush. Mais c’était complètement on message.  Il faut apprendre à attendre l’inattendu. »

Les réseaux sociaux comme Facebook, My Space, YouTube, ont permis à l’équipe d’Obama d’avoir, auprès des gens, un accès impensable autrement, à cause de leur caractère hautement personnel. « Vous faites d’abord confiance aux gens qui vous connaissent, et que vous connaissez », soulignait Rahaf Harfoush, avant de tenir le genre de propos qui, au départ, peut être susceptible d’irriter (ou à tout le moins d’inquiéter) n’importe quel journaliste:  « Tout cela nous permettait de vraiment passer le message que nous voulions, sans avoir à  dépendre des nouvelles locales, de CNN…  » Exactement le rêve de tout politicien « control freak », serait-on porté à penser.

Et pourtant… c’est là qu’on réalise à quel point les choses ont changé. En effet, cette volonté de « by-passer » les médias n’a rien de nouveau. Mais, dans le contexte d’aujourd’hui, elle prend désormais un tout autre sens. Elle cohabite aujourd’hui avec une logique de grande décentralisation et d’extrême ouverture.

Et d’autre part, autant  il y a, dans la ruée vers les médias 2.0, un côté très individualiste, autant ils ont un incroyable pouvoir de rassemblement et de mobilisation commune. Pour les experts dans le domaine, cela peut sembler une évidence, mais c’est tout de même un côté que, finalement, on n’a pas souligné tant que cela. Les nouveaux médias ont été essentiels pour aider l’équipe d’Obama à générer un véritable mouvement collectif, en ralliant des gens qui, jusque-là, ne se sentaient pas concernés par la politique… ou, à tout le moins, n’avaient pas l’impression qu’ils pouvaient faire une différence, qu’ils avaient un rôle à jouer.

Obama et son équipe ont su focuser sur les petites actions, les petits gestes qui, multipliés des milliers de fois, finissent par faire une différence : que chacun fasse cinq appels; que chacun donne un petit montant, ne serait-ce que  5 $ ou 10 $. On a vu la suite… avec, entre autres, le passage de la Maison-Blanche à l’ère 2.0, ce qui marquait tout un contraste avec l’administration précédente.

Voici d’ailleurs à ce sujet, comme bonbon pour la fin, un délicieux rappel de l’ère, pas si lointaine, où George Bush, quant à lui, employait des termes comme  « les Internets » et « le Google ». Quelle différence, quand même, non ?

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