Une réflexion sur les changements… aidée par Downton Abbey

C’est un passage dans ce reportage de La Presse, dans lequel la journaliste et chroniqueuse Marie-Claude Lortie a visité le château où est tournée la série Downton Abbey, qui m’a fait réfléchir à propos de la notion de changement. On peut y lire: « La série commence avec le naufrage du Titanic, en 1912. Suivront la guerre, l’épidémie de grippe espagnole, le tout mélangé avec l’arrivée du téléphone, de l’électricité, des suffragettes… »

L’époque de Downton Abbey: méchants changements, quand on y pense…

Et tout à coup, j’ai été frappée par le contraste avec tout ce qu’on n’arrête pas de lire et d’entendre, sur notre époque démente, les changements accélérés, etc., etc. Tiens, me disais-je, c’est vrai: ce n’était pas rien, cette quantité de bouleversements si fondamentaux, traversés à l’époque en assez peu de temps, finalement. Et idem, sans doute, pour la période qui a entouré la Seconde Guerre mondiale.

Et aujourd’hui? C’est sûr qu’on est au milieu d’une période de changements accélérés. Et que l’immense connectivité entraînée par internet d’abord, puis par l’essor des réseaux sociaux, a d’immenses répercussions, et partout en même temps sur la planète.

Mais quand même. Comment tout cela se compare-t- il à quelque chose comme une guerre mondiale? Au fait, pour les femmes, d’être acceptées comme citoyennes à part entière?

À quoi tient au juste cette impression de vivre toujours des changements tellement immenses, de nous sentir constamment dépassés? Est-ce qu’on ne manquerait pas tout bonnement de recul, en étant toujours convaincus que les problèmes que nous vivons sont sans précédent, et toujours plus insurmontables que tout ce qui s’est vu jusqu’ici ?

Et j’ai une théorie additionnelle: n’y aurait-il pas eu une certaine enflure dans les médias, autour des changements des dernières années, justement parce que ces changements affectent avant tout… les médias? Et puis, maintenant, les médias sociaux?

C’est sûr que les journalistes se sont beaucoup excité le poil des jambes avec la fragmentation, et le déclin des médias « traditionnels ». Mais qui cela concerne-t-il tellement, hormis eux-mêmes? Et c’est sûr que la blogosphère s’emballe à chaque nouveauté annoncée par Facebook, Twitter ou Instagram. Mais, encore une fois, cela concerne avant tout… les mordus de Facebook, Twitter, Instagram, et tutti quanti. Et puis, comment cela se compare-t-il à l’accession au droit de vote pour les femmes? Aux batailles de la Seconde Guerre mondiale, l’Holocauste, l’avènement de la bombe atomique ?

Enfin, ce sont juste des questions…

MAJ 9-1-2013

Ce billet m’a valu d’intéressants commentaires sur Facebook. Les voici.

De la part de 



Colette Brin Professeure: Et de bonnes questions! L’ère des médias sociaux et de l’emballement médiatique est aussi celle qui nous fait découvrir et partager l’euphorie (et la déception) du printemps arabe, l’indignation des Indiens face au viol collectif d’une jeune femme, la diffusion d’informations militaires et diplomatiques grâce à Wikileaks… peut-être que notre époque est surtout celle de l’anxiété de la surinformation et de la surveillance permanente.

De  



Marie Hélène Labory: Du temps que j’étudiais en histoire, nos professeurs nous mettaient souvent en garde contre ce réflexe de considérer notre époque comme exceptionnelle. Ou encore contre celui de la considérer comme une ère de décadence. Ce sont en quelque sorte des «illusions perceptuelles» fréquentes, pas juste maintenant ni ici.

De 



Sylvain Carle : Un petit contre-point, appuyé par la réflexion de Michel Serres trouvée ici. Nous vivons réellement un changement d’époque et de mode d’accès (et de partage) de l’information. C’est la troisième vague de Toffler. Ce n’est pas rien. Ce n’est pas parce qu’on en discute sur facebook que c’est *si* important mais peut-être que tout ces hyperliens et ces échanges représentent vraiment un possible qui ne l’était pas avant. Et je peux même simplement ajouter Martin Lessard dans cette conversation. Comme ça. C’est encore mieux que ma sorcière bien-aimée ce truc, c’est le clavier du sourcier (ok, j’étire la référence un peu là).

Et ma réponse: Merci de vos intéressants commentaires. Sylvain, je ne nie pas que nous vivions des changements majeurs… Mais je souligne simplement qu’on en jauge souvent mal l’ampleur quand on est plongés dedans. Et qu’on gagne parfois à regarder les événements passés (maintenant qu’on peut le faire avec un certain recul), en se demandant comment les gens les vivaient à ce moment- là… Et puis, je persiste à penser que nous, journalistes, blogueurs, commentateurs en matière de médias, de médias sociaux, de techno, etc., avons tendance à voir à travers une loupe les enjeux qui nous concernent directement… en même temps qu’on fait preuve de myopie par rapport à d’autre chose. C’est humain… mais ça finit par affecter les perceptions générales. Et je voulais juste questionner cela.

Voilà. Pas trop mal, quand même, pour une réflexion amorcée à partir d’une simple série télé ;-) .

 

Laisser un commentaire