«Rebelle», après «M. Lazhar» et «Incendies»: l’étrange cas du Canada aux Oscars

Il y deux ans, à l’occasion des Oscars, j’avais publié ce billet, pour parler de la situation de conjoncture qui entoure les nominés québécois: or, le contexte de la nomination de Rebelle, de Kim Nguyen, est exactement le même, que l’an passé, pour M. Lazar de Philippe Falardeau, et l’en 2011, Incendies de Denis Villeneuve. Idem d’ailleurs pour Denys Arcand, qui avait remporté l’Oscar pour Les invasions barbares, en 2004 après avoir été deux fois nominé auparavant.

RebelleOr, tous ces films sont nominés dans la catégorie « Meilleur film en langue étrangère » (« Best Foreign Language Film» ), c’est-à-dire dans toute langue autre que l’anglais. Et donc, ces films se sont retrouvés finalistes, au nom du Canada, uniquement parce qu’il s’agit de films en français (et, pour Incendies, en partie en arabe). Et donc, tout le pays, à ce genre d’occasions, espère la victoire d’oeuvres qui dépendent de l’existence, dans le Canada, d’un Québec francophone.  Assez drôle, quand on y pense, non?

À noter par ailleurs que cette catégorie de

Henry

«Rebelle» de Kim Nguyen, et «Henry», de Yan England: deux productions québécoises, qui représentent le Canada aux Oscars.

«Best Foreign Language Film», en elle-même, est loin d’être exempte de discussions et de controverses. Jusqu’en 2006, pour être considérés dans cette catégorie, les films devaient être dans une des langues « officielles » des pays concurrents. On a changé cela après la controverse autour du film italien Private, qui était principalement en arabe et en hébreu, et avait donc été disqualifié au départ. J’ai appris ces détails grâce à la référence au sujet de cette catégorie sur Wikipedia. Ce qui a permis au film canadien Water de Deepah Mehta, tourné en hindi, d’être nominé en 2007 dans cette catégorie.

J’en ai appris plus, d’autre part, autour de cette catégorie grâce à cette chronique de Martin Knelman, qui est « entertainment columnist » au Toronto Star, et sur laquelle je suis tombée par hasard au fil de mes recherches sur Google.  On y comprend à quel point la compétition n’est pas simple… et le choix non plus, pour les juges. On y apprend aussi que, outre le critère des « langues officielles », il y a eu d’autres changements apportés à la façon de faire les choix dans cette catégorie.  Et donc, en lisant cela, on comprend pourquoi on lit et on entend souvent que le simple fait d’être nominé représente déjà une vraie victoire. Et que le fait de gagner ne dépend uniquement de la « pure » qualité. (Ce qui ne nous empêche quand même  pas de pavoiser quand on gagne.)

Évidemment, le Canada est loin de dépendre juste du Québec pour se distinguer aux Oscars. Pensons seulement aux honneurs remportés par James « I’m the king of the world ! » Cameron, pour Titanic en 1998 (meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur montage). Et à Norman Jewison, maintes fois nominé (In the Heat of the Night, A Soldier’s Story, Moonstruck, etc.) et à qui l’Academy of Motion Picture Arts and Science a décerné en 1999 le Irving G. Thalberg Memorial Award qui récompense un apport exceptionnel au cinéma. Puis, en 2006, il y a eu Paul Haggis,  Oscar pour le meilleur scénario original, avec Crash. Mais ce n’est pas sûr que  la plupart des gens (des américains, en tout cas) sachent seulement qu’il s’agit de canadiens. Il y a quand même les productions de l’Office National du Film du Canada (12 Oscars, 70 nominations) et les films de Atom Egoyan (nominé deux fois en 1998 pour The Sweet Hereafter) pour avoir une saveur plus évidemment « canadienne « .

En terminant, on ne peut pas non plus manquer de souligner aussi la nomination du court métrage Henry, conçu et réalisé par l’animateur et comédien Yan England. Dans ce cas-ci, la nomination ne dépend pas du faIt que le film doit dans « une langue autre que l’anglais »… Mais la catégorie « court-métrage » par ailleurs, est toujours très cosmopolite, avec des nominés de divers pays.

 

  1. Le Canada anglais souffre beaucoup de son américanité et ses créations passent souvent inaperçues dans le tourbillon états-unien. Il faut dire que bon nombre de ses créateurs oeuvrent déjà aux USA. Sans compter que sa population est une fervente consommatrice de produits américains. Les 29 émissions les plus regardées à la télé, sur 30, sont des séries américaines. Le gala des Genie n’est presque pas regardé parce que les Canadiens anglais ne connaissent pas les films en nomination.

    Je pense que leur réaction vive devant la société distincte québécoise, leur refus de nous reconnaître comme nation, vient du fait qu’ils sont férocement jaloux de notre identité, autrement mieux définie que la leur.

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