Quel sera le prochain Apple ?

Voici l’extrait d’une lettre parue dans La Presse en septembre dernier, où une lectrice raconte ses démêlés avec son nouveau téléphone portable : « Ayant oublié comment opérer les cinq boutons de la plaque, je ne suis pas arrivée à retrouver mes messages. (…) Je les ai effacés sans m’en rendre compte, paraît-il. Il m’aurait fallu appuyer longtemps sur le chiffre 1 pour entendre les messages vocaux après avoir donné mon numéro de code dont je ne me rappelais plus, évidemment. Quant aux messages texto, il faut procéder d’une autre façon pour les obtenir. »

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La philosophie de Apple: prendre le parti des humains plutôt que des machines. Est-on en train de l’oublier ?

On a tous, à un moment ou l’autre, gentiment ri de nos parents ainsi déconcertés par les « nouvelles technologies ». Mais attention. D’une part, jeunes d’aujourd’hui, n’oubliez pas que vous êtes les vieux de demain… et les futurs « largués » de changements qu’on n’arrive même pas encore à imaginer. D’autre part, honnêtement : est-ce qu’on ne s’enfarge pas tous quotidiennement, peu importe notre âge, dans les complications technologiques ?

J’ai déjà abordé le fossé qui sépare les « geeks » férus de technologie et de réseaux sociaux du reste du monde. Fossé dont l’impact compte, dans les entreprises, sur le plan de la gestion : puisque tout évolue vite, les moins à jour sont souvent les dirigeants, trop occupés ailleurs. Et bien des « experts 2.0 » qui les ridiculisent se tirent dans le pied : comment convaincre des patrons de mieux utiliser la technologie et les médias sociaux s’ils se sentent dépassés, voire incompétents ? De la part de tels experts, c’est une incompétence à bien servir son client, qu’on enveloppe dans un sentiment de supériorité.

C’est aussi l’attitude de plusieurs entreprises face à leurs consommateurs. Combien de fois vous êtes-vous retrouvé empêtré dans les multiples télécommandes pour la télé, en attente du beau-frère ou de l’ami un peu plus « geek » qui vous avait dépanné la dernière fois ? Et combien de transactions sur internet vous ont obligé à tâtonner, à cause d’indications pas claires ou d’une ergonomie mal foutue ? Au point parfois, d’abandonner la transaction. À laquelle vous êtes peut-être revenu plus tard. Mais peut-être pas, non plus : perte sèche pour l’entreprise…

Et je me prends à rêver : quelle sera l’entreprise à voir dans tout cela les occasions à saisir ? À partir du principe que la technologie devrait, au départ, être simple et agréable à employer ? À se dire que les interfaces devraient s’adapter aux utilisateurs, et non le contraire ?

Mais attendez un peu, tout cela me rappelle quelque chose… N’est-ce pas, justement ce qu’avait fait Apple ? En questionnant les idées reçues, en prenant le parti des humains plutôt que des machines, cette entreprise surgie de nulle part à la fin des années 70 ne s’est pas seulement approprié un marché : elle a obligé tous les autres concepteurs d’ordinateurs et de logiciels à changer leurs façons d’agir.

On fêtera bientôt les 30 ans du Macintosh, préfiguré par son fameux message « 1984 ». Et l’on se rend compte que, mine de rien, on est retombé dans les mêmes pièges face à la technologie : manque de compréhension, sentiment de perte de contrôle et frustrations, le tout débouchant sur une sorte de résignation tranquille.

Quel sera le prochain Apple ? Qui sera le prochain Steve Jobs ? Qui viendra de nouveau bouleverser les idées reçues et, avec elles, notre rapport à la technologie ? Il y a décidément une place à prendre.

Suite à la publication de ce texte comme chronique dans le dernier Infopresse, Pascal Deschênes, de PND Design, m’a envoyé, via Twitter, sa réponse à la question: quel sera le prochain Apple ? Selon lui, c’est la nouvelle plateforme IOS de Apple qui, selon lui s’est ainsi « réinventé ». Vous pouvez entendre son point de vue ici. Qu’en pensez-vous?
  1. Certaines entreprises réussissent plus facilement que d’autres à créer des produits faciles et agréables à utiliser (exemple, Apple vs Microsoft), mais de façon générales les choses se sont beaucoup améliorées. On n’est plus surpris d’entendre un VP marketing dire à son équipe : « Mon fils de 3 ans est capable d’utiliser mon iPhone. Je m’attends à ce que le site web que vous allez faire soit aussi facile à utiliser pour mes clients. » Apple a montré la direction, nous sommes plusieurs y à aller. :-)

  2. Sur la question des jeunes « nés dedans la technologie numérique », je lisais récemment,dans le cahier Education Life du New York Times (http://nyti.ms/TXX4Dx)ce constat fait par l’auteur d’un portrait des étudiants américains d’aujourd’hui: « When we asked how they adapted to the tidal wave of new technology, one student said, ‘It’s only technology if it happened after you were born.' »

    Pour les vieux qui ne sont pas nés dedans (j’en suis), c’est un apprentissage plus ou moins laborieux. Pour les natifs, c’est la langue maternelle, celle qu’on apprend naturellement et rapidement.

    Le problème, c’est que cette langue change constamment – au rythme de la fameuse loi de Moore, qui serait devenue une « self fulfilling-prophecy » utilisée par l’industrie pour planifier son développement.

    En espérant que les apprentis sorciers ne se trouvent pas un jour eux-mêmes dépassés par leur magie.:-)

  3. 30 ans de MacIntosh ! | Marie-Claude Ducas - pingback on 24 janvier 2014 at 16 h 01 min

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