Pourquoi la candidature de Léo Bureau-Blouin est une excellente chose

Malgré tous les bémols et les mises en garde qui ont été émis, je ne vois en fin de compte que des côtés positifs dans la décision de Léo Bureau-Blouin de se lancer en politique, avec le Parti Québécois. (Remarquez, j’en verrais sans doute aussi s’il avait annoncé qu’il se lançait avec les Libéraux; mais là, on n’aurait jamais cru à autre chose qu’à un Poisson d’avril, même à la fin juillet.)

Léo Bureau-Blouin

Léo Bureau-Blouin, candidat: s'atteller à changer les choses de l'intérieur.

Je m’aperçois quand même que, s’il était mon fils, je ne trouverais pas l’idée tellement géniale. En fait, je l’admets, je lui aurais servi d’emblée une solide dose de : « Ah non, quand même pas à 20 ans, tu n’as fait que le Cégep, arranges-toi au moins pour avoir un diplôme universitaire, laisse-toi vieillir un peu, tu n’as pas idée de ce que c’est, etc., etc. ». L’analyste Benoît Aubin, au 98,5FM mardi, (en seconde moitié de chronique) tout en rendant hommage aux immenses capacités de Léo Bureau-Blouin (« un Sydey Crosby de la politique »), identifiait d’ailleurs de façon très perspicace ce qui joue contre le fait de se lancer dans un univers sans merci comme la politique, avec si peu d’âge et d’expérience. Entre autres : « En politique, inévitablement, un jour tu vas te faire battre. Et là, à 29 ans, ou à 32 ans, le beau bonhomme, dans une tout autre phase de sa vie, va se retrouver  ex-député. Avec pas de diplôme . Et alors que, dans 4 ans, il aurait le même talent, avec en plus un diplôme en poche .» Quant à Mario Dumont, il s’appuyait sur son expérience de première main en politique pour décortiquer, de façon aussi lucide qu’impitoyable, les pièges et déceptions qui attendent la nouvelle recrue.

Malgré tout cela je ne vois que de bons côtés à la nouvelle… Du moins, étant donné que Léo Bureau-Blouin n’est pas mon fils. Et que je n’aurai jamais à considérer et à discuter, sur un plan personnel, les conséquences de sa décision.

Pour commencer, c’est une superbe réponse, rafraîchissante et difficile à contester, à tous les radicaux (les quelques « vrais » comme les nombreux « pseudo-») qui promènent toujours le même  discours improductif, voire dangereux, comme quoi « il faut jeter à terre le système, toutes les institutions,  politiques, économiques, légales et judicaires, ne valent rien, il faut faire table rase et tout reprendre à neuf, etc. » Voilà quelqu’un qui se met en frais de changer les choses de l’intérieur, en se servant des structures en place. Et qui, s’il est vraiment sincère et compétent, a bel et bien des chances de contribuer à des changements valables. Comme bien d’autres qui ont emprunté la même voie avant lui. (Même si, aux yeux des « radicaux », ça ne sera jamais suffisant. Mais cela, c’est une autre histoire.)

C’est une réponse, aussi, à tous ceux qui ont tendances à croire, et à déplorer, que les jeunes ne s’intéressent plus à grand-chose, et surtout pas à la politique. Non seulement en voilà un qui s’y  intéresse incontestablement, mais qui va aussi contribuer à re-piquer l’intérêt d’un grand nombre de jeunes. Si cela contribuait à contrer ce fléau qu’est le taux d’abstention,  ce serait déjà un énorme apport.

Ceci dit, des embûches et des désillusions, il y en aura amplement. Et qui donneront sûrement prise, à de nombreux commentaires de la part de« radicaux » et de cyniques. On a déjà un petit aperçu de ce à quoi ressemblera la bataille politique au ras des pâquerettes . Et on ne peut pas vraiment reprocher à son adversaire, le Libéral Alain Paquet, son commentaire ironique comme quoi «(Léo Bureau-Blouin) va pour la première fois être confronté à un vrai vote secret», en faisant allusion aux règles démocratiques du mouvement étudiant souvent attaquées par le gouvernement Charest; ni de relever diverses incohérences et contradictions dans certaines positions défendues lors du conflit étudiant pas la Fédération étudiante collégiale du Québec (FEUCQ), et soutenues par le PQ.

Comment défendront-ils leurs positions, comment arriveront-ils à réconcilier ces contradictions? Maintenant, on a au moins une chance de le savoir, et d’avoir de vrais débats sur ces questions. Comment Léo Bureau-Blouin s’en tirera-t-il en affrontant certains aspects décevants et pas toujours glorieux de l’univers  politique? Qu’aura-t-il à en dire? J’écris ceci sans ironie aucune, et pas du tout sur le mode « ah, ce sera intéressant de le voir se casser la gueule, et entendre ses propos naïfs ».  J’espère sincèrement qu’il sera bien encadré, et que ses compétences lui permettront de bien tirer son épingle du jeu.  Qu’il montrera assez de maturité pour évoluer, sans perdre ses convictions.

Il reste que, on a déjà un élément qui rendra cette campagne électorale intéressante, et digne d’être suivie. Comme elles le sont toutes, d’ailleurs, en fin de compte. (Enfin presque. Disons que celle menée par Jean Charest en 2008 sur le thème « Les deux mains sur le volant » passe bien proche de faire exception.).

Et puis, Léo Bureau-Blouin est-il vraiment trop jeune, et fait-il un mauvais choix de vie et de carrière? Après tout,  les « cheminements de carrière» sont quand même moins coulés dans le béton qu’autrefois;  on peut compléter un diplôme à toutes sortes d’âges, et de toutes sortes de façons. En politique aussi les temps changent et en voilà un belle preuve. S’il fallait que Léo Bureau-Blouin soit mon fils, et si je le sentais vraiment solide, articulés dans ses convictions (et déterminé à ne pas changer d’idée…), c’est sans doute ce que je finirais par me dire.

  1. Ghislain Carré

    À mon avis, il s’agit jusqu’à aujourd’hui, du point culminant de la « récupération totale » du prétendu « printemps érable » qu’ont fait les partis politiques et les politiciens, les syndicats, les journalistes et les médias, les analystes de toute sorte, etc. Le point vraiment culminant serait maintenant la récupération du plus anarchiste des leaders de cette « révolte de la jeunesse » par les syndicats. Ça viendra.

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