À propos de temps, d’argent, de réseaux sociaux… et de skieurs handicapés

Alors que s’achève cette semaine, qui pour certains (dont moi) en était une de relâche scolaire, je me permets un billet où il est question de ski. Et,  surtout, d’une organisation et de gens à qui je dois de pouvoir maintenant faire du ski en famille.

Parce que, chez les deux jeunes garçons- des jumeaux – que j’ai le bonheur d’avoir, l’un a des problèmes aux jambes. Sans aller dans les détails, il avait près de deux ans quand il a vraiment commencé à marcher, après diverses interventions( pose de plâtres, opérations…). Et il garde certaines faiblesses qu’il doit compenser. C’est finalement l’été dernier, à 10 ans, que Jumeau no1 a commencé  à faire de la bicyclette, seul et sans petites roues. Mais à part ça, il fait du ski ! L’hiver dernier, il a descendu une pente du Mont-Ste-Anne (une « facile », mais quand même). Et, il y a deux semaines, il s’en est payé une au Mont-Tremblant.

Un dimanche comme les autres au Mont-Avalanche... Pour d'autres photos, voir le site http://sportsadaptes.com/

Honnêtement, je ne sais plus comment, au juste, j’en suis venue à me dire « et si on tâchait de lui faire faire du ski ? » (Peut-être à force de soupirer chaque fois que, au hasard d’un ménage du garage, j’avais à déplacer mon équipement?)  Et j’avoue que je ne me rappelle plus au juste comment, de coup de fil en coup de fil, j’avais été dirigée vers Sports adaptés des Laurentides, un des (rares) organismes qui, pas trop loin de Montréal, fournit soutien, formations et équipements  à des skieurs handicapés. Quoi qu’il en soit, depuis cinq ans, huit dimanches  par hiver, nous nous retrouvons au petit centre de ski Mont Avalanche, où Jumeau no 1 a pu être pris en main par des moniteurs spécialement formés. Tous des bénévoles. Et tous de bons skieurs, avec au départ une formation de base comme moniteurs, à laquelle on a ajouté la formation spécialisée donnée par L’Association canadienne pour les skieurs handicapés.

Les activités de Sports adaptés des Laurentides sont, en fait, parrainées et financées par la Fondation Richard Lemieux. Pour en savoir plus sur l’histoire de la Fondation, créée par Henry Wohler, un directeur d’école à la retraite, allez cliquer sur l’onglet « histoire », sur le site de la fondation. Henry fait encore partie de ceux qui sont toujours là, chaque dimanche de cours, au Mont-Avalanche…

En ce qui concerne Jumeau no 1, il fallait, les premières années, deux personnes qui, chaque côté de lui, tenaient un perche sur laquelle il s’appuyait.  Plus, au début, une troisième qui ouvrait la pente en éclaireur. Maintenant, il lui suffit d’un moniteur, qui travaille avec lui sa technique. Ce qui n’est pas un mince défi pour autant : Jumeau no 1 peut avoir la tête dure… En effet, en plus de ses problèmes aux jambes, Jumeau no 1 est légèrement autiste. Pas de façon très prononcée, mais disons que d’avoir des gens plus aguerris à travailler avec des élèves spéciaux… ça aide. J’ajouterai que, quand arrive l’hiver, Jumeau no1 frétille à l’idée d’aller faire du ski. Et que je crois sincèrement que, en plus de l’aider à renforcer ses jambes, le ski l’aide beaucoup, tant pour ce qui est de la discipline que de la confiance en lui.

Et ceci dit, pour les moniteurs, il n’y a pas deux skieurs pareils, et il n’y a pas deux défis qui se ressemblent. Il y a des skieurs qui, comme Jumeau no1, skient sur leur deux jambes, tout en ayant besoin de différentes pièces de matériel pour les aider (que ce soit pour attacher leurs ski, s’appuyer en skiant, etc.). Les pièces en question ont souvent été inventées et bricolées ad hoc, par un membre un peu ingénieux et débrouillard dans l’équipe… Et puis, il y a des «skieurs assis », qui n’ont pas l’usage de leurs jambes, et skient dans des traîneaux spécialement conçus. Je pense que, moi-même, je me rends à peine compte de ce que cela prend de force, en même temps que d’habileté, pour aider à monter ces traîneaux sur les télésièges…

Mais cette saison-ci a été différente des autres. Pour commencer, elle a été précédée d’une réunion d’urgence, un soir  vers la mi-novembre, lors de laquelle les organisateurs ont prévenus qu’ils n’étaient pas sûrs de pouvoir assurer les cours à chaque fois : manque de ressources, et manque, surtout, de bénévoles. Je vais rapporter, au mieux de ma mémoire, ce que disait lors de ce meeting Andrée Montpetit, une des responsables du programme depuis des années : « Avant, on arrivait à recruter des bénévoles. Maintenant, c’est de plus en plus difficile de trouver des gens qui sont prêts à s’impliquer, et sur qui on peut compter pour être là, de façon constante. C’est aussi plus difficile avec les jeunes. En plus de leurs études, ils ont presque toujours des emplois à temps partiel. Ils sont trop occupés… »

J’avoue que cette réunion, hormis les conséquences directes pour la Fondation, m’a laissée songeuse à bien des égards. Je pensais, pas seulement au rythme de vie que l’on mène et à la place du bénévolat, mais surtout à tous les discours enthousiastes sur les progrès des communications, les bienfaits des réseaux sociaux, la façon dont tout cela est supposé nous rendre tellement plus « connectés » les uns aux autres… Et, en rentrant chez nous cette soirée-là, j’avais plutôt en tête les paroles d’une ancienne chanson de Michel Rivard : « Qu’est-ce qu’on a gagné dans tout ça ?»…

…   Un moment de découragement, qui, je m’empresse de le dire, ne reflète pas ma façon globale de voir les choses. Je ne crois pas que les gens soient moins ouverts, moins impliqués et moins « civilisés » qu’avant. Par contre, bien des choses ont changé, autant dans nos façons de vivre en général que dans les façons de communiquer. Et  souvent, elles ont changé trop vite pour que de telles organisations, qui fonctionnent comme on dit, « à l’huile de bras », aient eu le temps de s’y adapter. Comment peut-on intéresser des moniteurs potentiels ? Quel est le meilleur moyen de les rejoindre? Comment faut-il s’y prendre pour faire connaître les activités de la Fondation ? Qu’y a-t-il à améliorer dans la façon d’aller chercher des fonds ?

Je reparlerai de ce dossier dans l’avenir, quand on commencera à mettre en place les stratégies en vue de la saison prochaine.

D’ici là, n’hésitez pas à faire circuler l’information vers quiconque pourrait être intéressé, et pourrait aider à y changer quelque chose. Et puis, si vous êtes dans les Laurentides ce dimanche 6 mars, vous pouvez aussi venir faire un tour au Mont Avalanche, alors que se déroulera la course qui clôture, comme chaque année, la saison des cours. En plus de voir les moniteurs et les skieurs en action, vous allez y découvrir une petite station de ski, idéale pour ceux qui veulent un endroit hyper-accessible pour skier avec de jeunes enfants. Et dont la cafétéria est opérée depuis cette année par un traiteur (Chef Franck) qui propose des plats à emporter… et dont la cuisine se fait littéralement dévaliser, depuis le début de la saison, par les gens qui sont en week-end dans les environs. On appelle cela joindre l’utile à l’agréable.

D’ici là, bon week-end tout le monde, et, pour ceux que cela concerne,  bonne fin de vacances ! Et je répète l’essentiel: surtout, faites circuler ce billet vers quiconque pourrait être intéressé, d’une façon ou d’une autre.

  1. Bonjour,

    J’ai lu votre blogue pour la première fois, via la page Facebook d’Infopresse. Votre article m’a interpelé car je suis la maman d’une petite fille de 10 ans, atteinte de spina bifida.
    J’ai longtemps skié, puis j’ai arrêté par manque de temps. Lorsque ma fille est née, il est devenu plutôt difficile d’imaginer faire des activités sportives en famille (elle a les jambes paralysées).

    Et bien vous savez quoi? J’ai recommencer à skier toutes les fins de semaines grâce à elle qui fait du ski adapté au Mont-Tremblant! Nous y allons justement pour la semaine de relâche.
    Bref, j’ai vu plusieurs similitudes entre nos deux histoires. Je me permet donc de vous partager un vidéo de ma fille en ski (pris il y a 2 ans) : http://www.youtube.com/watch?v=Lh3UMLX_mtU

  2. Marie-Josee Roy

    Bonjour Marie-Claude ! 5 annés sont passées depuis ce texte ! Mais aujourd’hui, un peu grâce à vous et beaucoup grâce aux bénévoles et à ce merveilleux programme, notre grand champion de 5 ans a participé fièrement à son premier Guestimation ! Je nous ai tellement reconnu dans votre blog ! Les garçons ont tous les deux commencé à 5 ans, tous les deux avec 3 moniteurs. De l’équipement adapté avec du « jus de bras » tellement qu’ils n’ont pas hésité à modifier le snow-slider pour Gabriel ! Et aujourd’hui votre grand champion qui a remporté la médaille d’or ! Wow ! Tout un exemple ! Votre texte aura réussi à faire son bout de chemin et nous aura permis de vivre un premier hiver de ski extraordinaire ! Merci de l’avoir partagé et à l’an prochain ! On a déjà tellement hâte de recommencer ces 8 semaines !

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