REÉR, pub et clichés : pour en finir avec le voilier de la retraite

J’aurais même pu intituler ce billet : « pour en finir avec Liberté 55 ».  Alors que, comme chaque fois qu’approche l’échéance pour cotiser, les pubs pour les REÉR commencent à se multiplier, je suis frappée par le contraste offert, cette année, entre l’imagerie traditionnelle de ces pubs, et tout ce que l’on entend et lit, ces jours-ci, sur la réalité et l’avenir en ce qui concerne la retraite.

Récente publicité de TD Canada Trust: au moins, c'est autre chose que la croisière. Mais...

Récente publicité de TD Canada Trust: au moins, on a trouvé autre chose que l'éternelle croisière. Mais...

Il suffit de voir ce qui ressort des articles liés à l’économie dans le dernier magazine L’actualité, qui présente en dossier principal un Guide de survie aux années 2010. Ceci dans la foulée de l’étude, co-présidée par l’ex-homme politique Claude Castonguay, le « père » de notre assurance-maladie, dont  les conclusions continuent d’être répercutées et commentées, et qui met de l’avant le besoin de remettre en question notre conception de la retraite, notamment l’âge auquel il est souhaitable de la prendre. Entre autres parce que le contexte – tant en ce qui concerne l’économique que la capacité de travailler –  a changé depuis l’époque où l’on avait fixé ici l’âge de la retraite à 65 ans.

Or, la plupart des pubs sur l’épargne-retraite continuent de reposer essentiellement, sur l’idée que nous rêverions tous, une fois achevée notre « vie utile », de passer le plus clair de notre vie à nous prélasser sur une plage, à faire des croisières ou des voyages autour du monde, ou à pêcher. Ou, à la limite, à skier et nous occuper de nos petits-enfants. Et d’ailleurs, je m’empresse de préciser que j’ai utilisé ici, pour fin d’illustration, des publicités de TD Canada Trust  et de la Banque Nationale, mais que ces entreprises ici ne sont vraiment pas spécialement ciblées par mes commentaires;  les constatations que je fais ici sont générales, et s’appliquent à de nombreuses entreprises ces dernières années. En fait, les deux publicités que je montre ici commencent même à rompre avec les éternels clichés.

La pêche, autre grand classique dans l'imagerie de la retraite

La pêche, autre grand classique de l'imagerie de la retraite...

Mais tout de même, et cela fait un moment que je me pose  la question: à quand des pubs encore plus en phase, non seulement avec la réalité, mais aussi avec l’air du temps ? Parce que, hormis le discours pas trop réjouissant – mais hélas très réel, à ce qu’il paraît-  sur le fait que la plupart des gens ne pourront tout bonnement pas se payer le genre de retraite que l’on voit dans les pubs, il y a aussi que bien des gens n’en voudront pas.  N’en veulent déjà pas. Il y a des gens qui aiment leur boulot, et qui auraient envie de continuer, à plus forte raison si c’est avec des horaires moins serrés et stressants que ce qu’ils auront fait toute leur vie, « au quotidien ». Il y en a qui voudraient exploiter encore leurs talents professionnels, mais autrement, à leur propre compte, par exemple. Ou en mettant ces talents au service d’une cause qui leur a toujours tenu à coeur.

Faites seulement l’exercice. Si vous êtes présentement à la retraite, ou si vous approchez de l’«âge admissible»: votre retraite ressemble-t-elle à celles des publicités ? Voudriez-vous vraiment que ce soit le cas ? Si vous êtes plus jeune, pensez aux retraités que vous connaissez (parents ou même grands-parents, oncles et tantes, amis de la famille, etc.) : leur retraite ressemble-t-elle vraiment à cela ? En ce qui  concerne bien des retraités que je connais (à commencer par mes parents), il faut prendre rendez-vous pour les voir, sous peine de faire les frais d’un conflit d’horaire avec une de leurs multiples activités, non seulement de loisir, mais surtout de bénévolat pour un des organismes dans lesquels ils sont étroitement impliqués.

Et donc, pour en revenir à mon sujet premier: à quand des publicités de « planification financière » qui sortiront vraiment des clichés ? Bien sûr, il y a des gens qui veulent voyager ou partir à la pêche à plein temps, et c’est bien leur droit. Mais pourquoi n’a-t-on pas encore imaginé des concepts autour de retraites un peu plus intéressantes et « flyées » que la moyenne ? Des gens qui auraient réalisé le rêve de leur vie, mais en créant une business, en se dévouant pour une cause, ou – pourquoi pas – en faisant leur job comme ils auraient toujours voulu la faire, libérés de pressions d’horaires et des premières contraintes financières?  Il me semble qu’il y aurait, comme on dit, un créneau à prendre.

Et puis, je sais bien que la pub n’a pas pour but premier de remplir une mission sociale. Mais quand même, si ça continue, le fossé qui sépare la pub et la réalité – et les beoins liés à un avenir assez proche – aura bientôt quelque chose d’obscène. Et puis, à bien y penser, la pub peut de moins en moins se permettre d’être déconnectée des enjeux sociaux.  Au contraire, maintenant, la tendance, que les entreprises doivent refléter à travers leur marketing comme porur  tout le reste, est à la responsabilité sociale. En ce qui concerne les entreprises financières, la première responsabilité sociale ne serait-elle pas de trouver autre chose que faire l’apologie de l’oisiveté au plus sacrant, et pour l’éternité? Et à plus forte raison si c’est une option qui, en fait, est loin d’intéresser un si grand public-cible? Encore une fois, à bien des égards, il me semble qu’il y aurait des créneaux intéressants à prendre.

MAJ

Ah oui, dans le palmarès des clichés, j’ai oublié de mentionner un grand favori: le golf !

  1. J’ai aussi l’impression qu’on devient moins vite vieux : certains baby-boomers arrivent à la retraite en pleine forme et savent qu’ils vivront encore pas mal de temps. Le fait de vivre 15 ou 20 and à la retraite changent la donne. D’une manière générale, les annonceurs et les agences s’intéressent peu aux baby-boomers. Ils ont tort.

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